L'arbre solitaire
Déjà paru chez Claudiogène le 06 août 2007
Je le repère toujours. Il est seul, loin des futaies, des forêts, des bosquets, des nationales.
C'est l'arbre solitaire.
Dédaigneux
des platanes alignés et assassins, indifférent aux rondes formant
clairières, allergique à la promiscuité des jungles, il pointe le ciel
et cherche, tel un sourcier, la source.
C'est l'arbre solitaire.
Rescapé d'un feu de forêt, ses congénères décimés, il trône sur la falaise d'une calanque phocéenne, phare des âmes sensibles.
C'est l'arbre solitaire.
Anarchiste sublime, rétif aux lois de la nature, nul ne l'approche. On ne le voit que de dos, son visage est mystère. On s'interroge.
C'est l'arbre solitaire.
Proche des sommets, il se décale un brin pour troubler, s'installe sur les bords mais capte l'attention.
C'est l'arbre solitaire.
Il
ne demande rien et reçoit. Sans rien faire, il guide. Il n'attend pas
l'été. Il n'attend pas l'hiver. Les tempêtes le contournent,
respectueuses.
C'est l'arbre solitaire.
Énigmatique, il impressionne sans le vouloir. Il ne sera pas table, ni journal, ni piano, encore moins allumette ou billot.
C'est l'arbre solitaire.
Sa
quête assouvie, il se fera engrais, s'allongera sur le sol et s'y
enfoncera, offrant ses vieilles cellules aux humains de demain.
C'est l'arbre cimetière.