...pas facile tous les jours.

...pas facile tous les jours... d'être capable de solutionner des problèmes complexes très rapidement et se répéter plusieurs fois, dans la queue de la boulangerie "Bonjour Madame, une baguette s'il-vous-plait" pour, le moment venu, dire la phrase juste et surtout à la seconde juste, celle qui ne mettra personne mal à l'aise, celle qui facilitera le travail de la vendeuse, celle qui fera qu'on sera sorti le plus vite possible de la boutique. Ne pas demander cuite ou pas trop cuite car cet effort-là est plus cher payé que celui sans importance de devoir manger du pain qui ne serait pas exactement comme on le voudrait.
...pas facile tous les jours... de comprendre quelque chose très rapidement et de devoir trouver des astuces pour faire celui qui n'a pas compris afin de ne pas heurter l'autre qui pourrait se sentir rabaissé de mettre plus de temps. Et ça ne loupe pas. Quoi que tu fasses, on te trouve arrogant.
...pas facile tous les jours... de faire semblant de réfléchir alors qu'on a déjà la réponse. Car si on répond trop vite c'est qu'on se trompe. Et si on a toujours raison, c'est qu'on est prétentieux. Alors qu'on a fait l'effort et pris la précaution de n'annoncer que ce dont on était absolument certain, juste pour limiter les risques d'erreur.
...pas facile tous les jours... de se souvenir de tout, du bon et du mauvais. On est soit un "ordinateur", soit un rancunier. Alors qu'on a seulement organisé sa tête et mis en place des méthodes, créé des associations, pour atteindre l'information stockée plus facilement.
...pas facile tous les jours... d'avoir l'intuition éclair et la coalition adversaire.
...pas facile tous les jours... d'avoir la pudeur de cacher sa sensibilité, d'accéder au sang-froid facilement et de passer pour un insensible aux yeux des autres.
...pas facile tous les jours... de devoir freiner pour être compris, voire accepté. Que de dépense d'énergie pour faire moins, pour aller moins vite, pour attendre.
...pas facile tous les jours... de noter que non seulement il faut freiner, contrôler ses passions, ses émotions, ses ambitions, mais en plus, il faut vérifier, surveiller, tenir compte des actions et réactions des autres pour ne pas choquer, bousculer, créer une mésestime ailleurs. Et qu'après avoir fait tous ces efforts, pris toutes ces précautions, il faut en plus se justifier, prouver qu'on n'est pas arrogant, qu'on a fait tout cela avec recul, humilité et générosité... Pas facile tous les jours.
...pas facile tous les jours... parce que malgré tout ça, non seulement, on ne te comprend pas mais en plus, pendant ce temps-là, tu ne fais pas ce que la vie te dicte de faire.
...pas facile tous les jours... d'imaginer qu'à la fin de cette lecture certains vont encore y voir de la prétention.

...pas facile tous les jours... de tant aimer les autres.

Comments

[teb]

Mais.... et rester soi même, c'est difficile ?
;-)
Voilà une note dont j'apprécierais de parler "face à face", avec le complément des regards et attitudes ...

[Claudio]

Merci pour la précision sur le "manager" parce que j'aurais pu chercher longtemps ;-)
Pour le reste l'important c'est de se poser des questions.
J'apprécie qu'on puisse échanger nos questionnements et nos réflexions aussi franchement ici. Merci.

[Ludivine]

manger qui bottait en touche.... là je sais pas ce que j'ai voulu écrire. J'ai le ventre plein. Même pas faim ! Alors qu'est ce que j'ai voulu dire. Ah oui manager !

[Ludivine]

Tu me pousses dans mes retranchements...
Je me suis surprise à revoir un certains nombres de mes positions.
Avant je disais que même si l'intégralité de mon salaire devait passer dans les frais de garde je ne cesserais pas de travailler parce que j'avais besoin d'avoir une vie sociale. Me suis revue avec les collègues. Pas grand chose d'humain finalement. Politesse, discussions sans profondeur, respect de façade (ambiance de conflits larvés, jalousies, et manger qui bottaient en touche et laisser pourrir). Un jour, une de nos collègues nous annoncé qu'elle divorçait. Ce genre de nouvelles, tu ne peux guère le taire. Ca remets pleins de choses en question (congés pour déménager, congés pour aller au rdv chez l'avocat, la mine déconfite,...) et tes collègues ne peuvent pas ne pas le voir. Par contre, on ne savait pas que ça n'allait plus dans son couple et cela depuis plusieurs mois. Parce que ce genre de choses tu peux facilement le cacher à tes collègues. Finalement, relations sociales. Point.

J'aimais mon job. Concrétiser des projets ou les réaliser après les avoir pensé :-), les relations avec les vieux. Tout ça, j'aimais. Mais ça restait du boulot. Les vieux n'étaient pas mes amis. Malgré toute l'humanité et la chaleur des relations c'était mon boulot. Du social.

De fil en aiguille, je me suis surprise, en regardant les étoiles, à réécrire dans ma tête mon mémoire de DU consacré à l'animation sociale en géronto ! Plutôt que favoriser le maintien ou le retour à la vie sociale, favoriser le maintien ou le retour aux relations humaines. Je vais quand même pas tout réécrire. Mince alors ! :-)

Merci Claudio.

[Louis-Paul]

Tout est relatif, ainsi ne pas manger du pain blanc (sans jeu de mot) est vraiment très important pour moi. Dans la queue l'autre jour,un monsieur demande "pas cuit, bien blanc" juste devant moi. Cela m'a fait sourire mais je crois avoir de la chance, "on connaît" mes goûts à force d'avoir répéter "un peu cuit svp" et en général je n'ai plus à demander. Il y a donc de l'humain, une relation de quelques secondes mais une relation. Et quand j'ai un sourire, un mot sympa (que je rends), et bien je suis content.
surtout le dimanche matin, cela fait partie de ma "bonne journée". Mais peut-être suis-je hors sujet?